L’abolition du droit d’émission est un avantage

Normalement, c’est au moment où l’on réalise des bénéfices qu’on paie alors des impôts. Mais avec le droit d’émission, c’est exactement le contraire qui se passe : les entreprises rentables qui font des bénéfices sont épargnées et ce sont principalement les sociétés en crise qui sont taxées. En effet, au moment où une entreprise lutte pour sa survie, le droit de timbre d’émission entrave sa reprise. Les start-ups sont également concernées. Ces jeunes entreprises sont considérées comme trop « à risque » pour obtenir des crédits bancaires, et pour cette raison, elles dépendent des aides financières des investisseurs. Les entreprises qui souhaitent réaliser des investissements importants et créer des emplois sont également pénalisées. De nombreuses entreprises ne disposent pas de suffisamment de capital. Et c’est dans tous ces cas que les investissements en fonds propres de la part d’actionnaires sont nécessaires.

Le droit d’émission s’applique lorsqu’une entreprise a besoin de nouveaux capitaux propres. Si une entreprise emprunte des fonds, elle ne doit pas payer de droit d’émission. En revanche, si elle amène des fonds propres, elle est taxée. C’est une situation inadmissible ! Les entreprises en difficulté financière devraient être soutenues et non pénalisées davantage. Or, le droit d’émission produit l’effet inverse. Il met des bâtons dans les roues des entreprises. En conséquence, nous nous trouvons, en Suisse, face à une taxe nuisible à l’économie. Peu de pays auraient l’idée saugrenue de nuire à ce point à leur propre économie. Ce n’est donc pas pour rien que le droit de timbre d’émission n’existe aujourd’hui sous cette forme qu’en Suisse.

Le droit d’émission renchérit les investissements

En règle générale, une économie profite d’entreprises financièrement solides. Les pertes commerciales de ces entreprises peuvent dans ce cas être couvertes par des fonds propres. Malgré les pertes économiques, les emplois peuvent ainsi être préservés. A contrario, un excès de capital étranger (par exemple via des crédits bancaires ou des obligations) a un effet défavorable sur l’économie. Les intérêts sur les crédits bancaires et autres intérêts sur les dettes peuvent être déduits des bénéfices d’une entreprise, ce qui réduit l’impôt sur le bénéfice versé à la Confédération, aux cantons et aux communes. Ainsi, si une entreprise prospère dispose d’un capital propre important, elle doit faire appel à moins de capitaux étrangers. Le capital propre est imposé, et par conséquent, plus d’argent est versé dans les caisses de l’État.

La crise du Covid-19 rend cette question plus pertinente que jamais. Après la crise, de nombreuses entreprises devront arriver à se redresser financièrement. L’autofinancement des entreprises sera la solution idéale du point de vue de l’État. Les privés n’auraient pas non plus à supporter des coûts supplémentaires : les financements privés et publics ont un impact différent sur les entreprises. Les investissements privés ne reçoivent pas de fonds publics. Ils n’accumulent donc pas de dettes publiques. Rien que pour cette raison, il n’est pas logique que l’État impose le capital propre. Cela ne fait que peser sur l’économie suisse. Le droit de timbre d’émission est donc déraisonnable et totalement incompréhensible.

L’UE a une longueur d'avance sur la Suisse

Alors que la Suisse se prononce sur la suppression du droit d’émission sur le capital propre, l’UE a déjà une longueur d’avance. Début février, la Commission européenne élaborera une nouvelle proposition de loi. Les actionnaires devront payer moins d’impôt sur le bénéfice sur les fonds propres. L’UE est consciente que de nombreuses entreprises européennes ont été affaiblies par la crise du Covid-19, elle a donc intérêt à encourager l’autofinancement. En effet, les fonds propres sont indispensables à la reprise économique.

Des recettes fiscales plus élevées grâce à des réformes économiques réussies

Grâce à l’impôt sur le bénéfice des entreprises, les recettes publiques ont explosé ces dernières années (plus 3500% depuis 1990). Cette évolution est principalement due aux nombreuses réformes fiscales des 30 dernières années. Ce détail a probablement échappé aux référendaires. Ce sont surtout les impôts sur le bénéfice qui ont augmenté. Même le produit intérieur brut a pu être dépassé. Les chiffres absolus le prouvent également : l’impôt sur le revenu des ménages a été dépassé de plus de 12 milliards de francs. En outre, l’impôt anticipé doit être pris en compte. Les dividendes versés par les plus grands groupes suisses ont fait grimper leurs revenus. Au cours des 15 dernières années, l’État social suisse a été renforcé de 10 milliards. Sans les entreprises à haut chiffre d’affaires, ce financement n’aurait pas été possible.

Avec la suppression du droit d’émission, on évite de mettre des obstacles sur le chemin des entreprises. Car la levée de fonds propres ne devrait plus être pénalisée. Les entreprises doivent au contraire essayer d’accumuler suffisamment de fonds propres pour pouvoir réaliser des bénéfices le plus rapidement possible. En taxant les bénéfices, l’État recevra davantage d’argent. En fin de compte, la Confédération en profitera également.

Ruedi Noser, conseiller aux États ZH

Ruedi Noser