Jusqu’à 2007, le sursis à l’exécution d’une peine pouvait être octroyé s’il était la meilleure solution. La révision de 2007 a inversé la donne. Désormais, le sursis doit être octroyé pour toute peine privative de liberté de moins de deux ans ou peine pécuniaire, sauf exception. Et dans de nombreux cas, le juge n’a plus de marge de manœuvre. Le principe veut que toute première condamnation pénale à une peine de prison inférieure à deux ans soit systématiquement accompagnée d’un sursis complet.
En d’autres termes, on a décidé d’introduire un joker généralisé pour toute première infraction.
L’idée du sursis est belle. Elle repose sur des considérations humanistes de repentir et de resocialisation. Dans la pratique, on constate toutefois que les condamnés ne comprennent pas forcément le caractère punitif de cette sanction. Pour beaucoup, une condamnation avec sursis équivaut à un acquittement.
Plusieurs faits divers ont récemment défrayé la chronique. Des cas d’abus sexuels sur mineurs, de brigandage ou de rixe avec des armes ont été sanctionnés par des peines à l’exécution complètement suspendue.
La confiance des citoyens dans les institutions pénales s’en trouve affaiblie. Si l’Etat ne se charge plus de punir les auteurs de crimes et délits, quel crédit peut-on encore donner à notre justice ?
Contrairement à ce que semblent croire les auteurs du code pénal révisé, la peine n’a pas pour seule fonction de resocialiser et éviter la récidive. Le droit pénal a, en premier lieu, pour but de punir les infractions. D’infliger une sanction à un criminel. Avec le sursis automatique, le droit pénal a perdu une grande part de son rôle punitif. A l’inverse, les citoyens « honnêtes » sont souvent traqués, le crime devant être prévenu par la suppression des occasions de le commettre, quitte à restreindre d’autant les libertés des justiciables. Mais, lorsque le citoyen devient prévenu, on renonce à le sanctionner.
Cette approche doit être corrigée. Il en va de la crédibilité du système judiciaire. Peu importent les statistiques sur la récidive. Peu importe la réalité de la criminalité. Les Suissesses et Suisses attendent du système pénal qu’il sanctionne les crimes et délits à leur juste mesure.
Pour ces motifs, je déposerai, en session spéciale de mai, une motion pour redonner au juge le pouvoir de condamner à une peine ferme, y-compris lors de la première infraction.